vendredi 2 août 2013

À LA POURSUITE D'ENTOURAGE

Après une semaine à m'être alimenté exclusivement de viandes grillées, il est temps de poser un peu l'ordinateur et de lever mon derrière du transat pour un peu d'exercice. 14h me semble être le moment parfait pour faire suinter les litres de bières et de sodas avalés ces derniers jours. Et quoi de mieux qu'un kaway pour transpirer encore plus!

J'attaque donc mon footing sous 37 degrés. Pas d'air. Les conditions parfaites sont réunies. Quelques regards circonspects me foudroient lorsque j'engage mes premières foulées. J'ignore les curieux. J'ai vu tous les épisodes de Friday Night Lights, je sais encore comment m’entraîner.

Les 300 premiers mètres glissent comme dans du beurre. Ils me rappellent cependant que j'ai oublié ma gourde.

Après 25 minutes, j'atteins mon premier objectif : le parc. Le premier kilomètre est validé sans encombre. Le Kaway fait son effet et je me félicite de m'être souvenu de cette astuce d'oncle Bill. Je transpire plus que Zidane dans un maillot 100% coton. Tout va pour le mieux, mais quelques gorgées d'H2O seraient les bienvenues.

2 minutes plus tard, je m'écroule littéralement sur les graviers. Le sol me brûle les mains et la poussière finit de m'assécher la gorge. J'agonise. Heureusement, pendant que je rampe vers la fontaine la plus proche, un jogger me vient en aide. Il tient en laisse son fidèle compagnon, un rottweiler qui s'empresse de me lécher le visage et qui me tire par le col vers un carré d'herbe à l'ombre des saules pleureurs.

"Easy Arnold, easy", rigole-t-il gravement. Le son de cette voix ne m'est pas inconnu. Je lève les yeux. Il se tient au dessus de moi avec un large sourire. Il porte un pantacourt et arbore un t-shirt "Freedom or Death". Il a beau se camoufler sous son borsalino en paille et des Ray-ban, il ne trompe personne. En tout cas pas moi. Johnny Drama vient de me sauver du feu éternel.

Ma gorge est desséchée et je n'arrive pas à aligner trois mots. Observant mon moment de déficience, Johnny s'accroupit et m'aide à enlever mon kaway, qui libère alors une chaleur humide écœurante qui manque de nous faire tourner de l'œil. Je peux enfin parler. "C'est une idée de mon oncle". Sa réponse est sans équivoque. "Well, your oncle is a dickhead". Je ne peux vraiment pas le contredire et me rue sur la bouteille de Bio Energy qu'il me tend.

Réhydraté, je m'empresse de lui poser cette question qui me brûle les lèvres. "Vous le commencez ce tournage d'Entourage? On s'impatiente ici!". Mon ton est plus sec que ma gorge il y a 30 secondes, et je me sens alors stupide d'agresser Johnny de la sorte. Il me répond, sans rancune et après quelques sons gutturaux embarrassés, "Just call Ari". Cette réponse me laisse perplexe. Je n'ai pas mon portable sur moi et encore moins le numéro d'Ari Gold.

Mais les dieux des séries sont avec moi aujourd'hui. Johnny a à peine le temps de me raconter son légendaire "moment" avec une serveuse du Friendly's, qu'Ari surgit de nulle part, petit short et t-shirt trempé de sueur. Il affiche une moustache style début du XXème et est suivi au pas par Lloyd, en tenue de bureau, portant les bouteilles d'eau. "Ari! Ari!", s'époumone Johnny. C'est l'occasion ou jamais de sauver le film. Je "check ça" Drama en vitesse et me lance, plus fort que jamais, à la poursuite d'Ari. La voix graveleuse de Drama résonne dans mon dos comme un au revoir, "I don't care, i just want to find some pussies".

Ma non condition physique m'empêche de suivre le rythme démentiel de Ari Gold. Je coupe à travers le parc et dépouille un garçonnet de son bicycle. La fin justifie les moyens. Après de longues minutes de pédalage sous le soleil de plomb, j'arrive à hauteur du tandem infernal. Je l'interpelle entre deux inspirations, proche de l'arrêt cardiaque. "Ari! Ari! Arrête toi!". Il me répond sèchement. "Who the fuck is Ari? My name is Harry now". Je joue ma dernière carte et l'attrape par le t-shirt. Le carambolage est terrible et nous nous écroulons tous les trois. 

Lloyd est le premier à se relever. "Mister Selfridge is very busy today. Leave him alone", m'assène-t-il. Le moment de rupture est proche. Ari lui répond du tac au tac, "Shut the fuck up Lloyd". Je m'engouffre dans la brèche.  "Il faut que tu signes ton contrat Ari. Il faut que le film se fasse. Pour les fans". Je m'attends à prendre une gueulante mémorable. Il se relève calmement. Lloyd lui donne de l'eau et lui dépoussière les épaules. "You have balls. Ok let's sign the damned papers"

Entourage est sauvé. Dans un dernier élan de respect mutuel, il me tend la main pour me relever. Je tente un "Let's hug it out bitch". On se prend dans les bras. Drama débarque. Il nous a rattrapé avec Arnold et interpelle Ari, remonté comme une pendule. "Ari, you didn't return my calls!". Tout le monde éclate de rire. Ce bref instant de bonheur est interrompu par le regard persistant des trois hommes sur ma personne. En effet, de l'eau coule en abondance sur mon visage et je ne parviens pas à stopper l'hémorragie hydraulique...

Je me réveille à l'ombre d'un saule pleureur, noyé par les badauds paniqués qui me balancent des litres d'eau à la figure. Soulagés de me voir ouvrir les yeux, ils me font maintenant la morale sur les risques du sport en plein cagnard et me force à boire en quantités industrielles. Je me relève et rentre chez moi, flottant au dessus des bons samaritains. J'ai passé l'après-midi avec Johnny Drama et Ari Gold. Et ça, même en rêve, ça n'a pas de prix.



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