samedi 21 décembre 2013

SÉRIES FRANÇAISES : LA LANGUE COMME FREIN ?

Les avis pullulent sur le retard français dans la création de séries de qualité. Et si la langue française était elle-aussi un frein à l’émancipation des séries hexagonales ?

















Après sa crise de Décathlon, Michael me devait, si ce n'est une explication approfondie, au moins une excuse sincère. Ma réclamation le perturba. Pris de court par mon attaque frontale, il se justifia avec maladresse, balbutiant une histoire sans queue ni tête. Cette scène me mis profondément mal à l'aise, comme lorsque je regarde une série française. Le spectacle de Michael s'enfonçant dans la mouise me fit m'interroger sur le rôle de la langue dans les séries.

Notre si belle langue, un handicap ? Cette hypothèse un peu folle mérite en tout cas qu’on y prête attention. 
Nos séries semblent être victimes d’un trop grand respect de la grammaire, oubliant un parler authentique. Une réplique du type « Comment osez-vous parler de ça maintenant ? » n’est pas rare dans une création made in France. Un peu lourd. On comprend la volonté louable de promouvoir le bon français. Seulement, ce respect de la langue alourdit une scène et peut empêcher l’empathie du personnage par le public.

Un complexe injustifié


Les scénaristes français en sont pourtant capables. Preuve en sont les shortcoms, dont les plus réussies attestent de notre capacité à écrire des dialogues percutants et divertissants. La langue ne semble donc pas être un frein. Son utilisation peut-être. Se complaire dans pareil complexe serait même un comble, compte tenu de l’aura d’un cinéma hexagonal mondialement reconnu. Bernardo Bertolucci n’hésite d’ailleurs pas à faire l’éloge du français, qu’il considère comme la « langue du cinéma ». 

D’où peut donc provenir ce sentiment ? Une comparaison avec l’anglais apporte un élément de réponse. Dans un article datant de 1991, Michael D. Picone, professeur de linguistique à l’université d’Alabama, observe que l’anglais est une langue qui a un besoin criant de nomenclature. Dans ce contexte, il devient une arme de développement idéale pour des séries dont l’essence même est le formatage. 

Le mythe de la patate chaude


Le français nécessite souvent plus de mots pour élaborer un dialogue et un effort d’articulation qui peut apparaître poussif et irritant à l’écran. Notre imaginaire souffre peut-être aussi du mythe de l’américain déblatérant des insultes mémorables avec une patate chaude dans la bouche.

Le français comme salut


Et si notre salut à l’étranger passait justement par la langue ? Sundance Channel a récemment diffusé Les Revenants en version originale, avec un succès critique à la clé. Bref aura aussi droit à son aventure américaine sous-titrée. De quoi réconcilier le public français avec ses séries ?

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